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Aux fidèles de la paroisse Sagrado Corazón de Jesús d’Ypacaraí (Paraguay) 

 

Mes chers amis,

La première lecture de la liturgie de ce dimanche 26 juillet présente Salomon, fils de David, à qui le Seigneur apparut en songe pendant la nuit.

Le Seigneur dit à Salomon : “Demande ce que je dois te donner”.Homilia 26 25 07 2020 1

Et Salomon répondit :

“Me voilà au milieu du peuple que tu as élu. Donne à ton serviteur un cœur docile pour qu’il sache gouverner ton peuple et discerner le bien et le mal. Sans cela, comment gouverner ton peuple, qui est si important ?”.

Le texte biblique poursuit en disant :

“Cette demande de Salomon plut au Seigneur, qui lui dit : ‘Puisque c’est cela que tu as demandé, et non pas de longs jours, ni la richesse, ni la mort de tes ennemis, mais puisque tu as demandé le discernement, l’art d’être attentif et de gouverner, je fais ce que tu as demandé : je te donne un cœur intelligent et sage, tel que personne n’en a eu avant toi et que personne n’en aura après toi”.

À la lumière de ce récit biblique, en revenant sur le thème des relations entre la politique et les hommes politiques, la question se pose : quels sont les hommes politiques qui plaisent à Dieu ?

Il ne fait aucun doute que ce ne sont certainement pas ceux qui affichent les signes de la foi ou qui utilisent l’Église pour leurs propres intérêts personnels.

Souvent, nous traitons la classe politique comme si elle devait répondre de ses actes devant les ministres de l’Église et non devant le peuple qui l’a élue.

À ce propos, je lis dans le journal “ABC Color” du 7 décembre 2016 :

“Chaque année se rendent en pèlerinage à Caacupé les autorités nationales des trois pouvoirs de l’État, des hommes politiques, des fonctionnaires de différents niveaux, qui font toutes sortes de promesses devant la Vierge. Le 8 décembre 2000 a été un jour très particulier, car l’Évêque célébrant a demandé aux fidèles présents de lever la main, en signe d’engagement à bannir le fléau de la corruption de notre pays.Homilia 26 25 07 2020 2

Tout le monde a accédé à la demande de l’Évêque. Seize ans (et on pourrait dire, sans risque de se tromper, vingt ans) après cette initiative novatrice, la promesse de bannir le fléau de la corruption des institutions publiques n’a pas été tenue. Au contraire, les affaires se sont multipliées en nombre et en millions de dollars et même les mécanismes ont été ‘modernisés’”.

Le Paraguay est régi par sa Charte constitutionnelle. C’est devant le Congrès que les plus hautes autorités de l’État prêtent serment, et non devant l’image de la Vierge de Caacupé.

Ne mêlons pas la Sainte Mère de Dieu à ces jeux d’enfants, où chacun se sent obligé de lever la main puis de continuer comme avant : tout changer pour ne rien changer.

Salomon, s’adressant à Dieu, se rappelle que le vrai serviteur de Dieu est au milieu du peuple et demande à Dieu “un cœur docile pour qu’il sache gouverner le peuple et discerner le bien et le mal”.

Il est facile de dénigrer la classe politique. Il est facile pour le peuple d’applaudir avec enthousiasme tout discours prononcé contre la classe politique, mais, par la suite, il continuera à la voter tranquillement, en oubliant tout ce qu’il avait dit.

L’attitude de Salomon, je le répète, est très différente.

Le Pape Benoît XVI, dans son discours au Parlement allemand le 22 septembre 2011, a parlé de Salomon et de sa demande au Seigneur, pour mettre en évidence les fondements de la politique et de ceux qui sont engagés dans la politique.

“La Bible – a dit Benoît XVI – veut nous indiquer ce qui en définitive doit être important pour un politicien. Son critère ultime et la motivation pour son travail comme politicien ne doit pas être le succès et encore moins le profit matériel. La politique doit être un engagement pour la justice et créer ainsi les conditions de fond pour la paix. Naturellement un politicien cherchera le succès sans lequel il n’aurait aucune possibilité d’action politique effective ! Homilia 26 25 07 2020 3Mais le succès est subordonné au critère de la justice, à la volonté de mettre en œuvre le droit et à l’intelligence du droit. Le succès peut aussi être une séduction, et ainsi il peut ouvrir la route à la contrefaçon du droit, à la destruction de la justice. ‘Enlève le droit – et alors qu’est-ce qui distingue l’État d’une grosse bande de brigands ?’, a dit un jour saint Augustin. Servir le droit et combattre la domination de l’injustice est et demeure la tâche fondamentale du politicien. La demande de Salomon reste la question décisive devant laquelle l’homme politique et la politique se trouvent aussi aujourd’hui. Au jeune roi Salomon, au moment de son accession au pouvoir, une requête a été accordée. Qu’en serait-il si à nous, législateurs d’aujourd’hui, était concédé d’avancer une requête ? Que demanderions-nous ? Je pense qu’aujourd’hui aussi, en dernière analyse, nous ne pourrions pas désirer autre chose qu’un cœur docile – la capacité de distinguer le bien du mal et d’établir ainsi le vrai droit, de servir la justice et la paix”.

Le Concile Vatican II affirme :

“Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : ‘Fais ceci, évite cela’. Par fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes, doivent chercher ensemble la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie sociale. Plus la conscience droite l’emporte, plus les personnes et les groupes s’éloignent d’une décision aveugle et tendent à se conformer aux normes objectives de la moralité” (Gaudium et spes, 16).

En ce temps du Coronavirus, un temps qui requiert le courage de Salomon pour gouverner en tant que serviteurs et non en tant que maîtres du peuple, prions le Seigneur pour qu’il ouvre les yeux de nos cœurs afin qu’une politique honnête, dans le respect du droit et de la justice, transforme notre ville, notre pays, le monde entier en jardin de Dieu.

Et que la bénédiction du Dieu tout-puissant,
le Père, le Fils et le Saint-Esprit,
descende sur vous et demeure toujours avec vous.
Amen.

 

Emilio firmaP. Emilio Grasso

 

(Traduit de l’italien par Michele Chiappo)

 

 

29/07/2020

 

Catégorie : Homélies et discours